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[Retour lieux hantés]


 

Explorateur insatiable des mystères de la nature humaine, Erick Fearson s’est rendu en Crète, l’été dernier, pour remonter le temps, à la rencontre des fantômes de l’Antiquité. Intrigué par le mythe de l’Atlantide, cette civilisation disparue révélée par Platon et tant convoitée par les scientifiques, il foule le sol d’Héraklion, un dimanche 13 août 2006, des projets d’expédition plein la tête et son matériel en poche. Sa réputation de mentaliste fait vite le tour de l’île. Avant d’inaugurer ses enquêtes surnaturelles, il enchaîne les lectures de tarot et les expériences psychiques, notamment dans les cafés lounge du quartier animé de la capitale. Hélas, la conduite crétoise ne fait pas défaut à sa mauvaise réputation. Quelques jours après son arrivée, Erick échappe de justesse à un accident de la circulation. De sérieuses complications ne cesseront alors de ponctuer son séjour au pays des ombres.

Mais, pour son plaisir de chasseur de fantômes (et pour celui de Maison-Hantee.com !), il s’est juré de les surmonter. Après tout, avec Erick, le monde des morts est souvent moins dangereux que celui des vivants…

Par Erick Fearson

Juillet 2006 : Au cœur de l’été, je me mets à rêver à de lointains rivages, de fantômes exotiques et de terres oubliées. Un lieu qui m’a toujours fasciné me vient à l’esprit : L’Atlantide ! Continent fabuleux ayant abrité l’une des civilisations les plus avancées de notre monde. Ses habitants, les Atlantes, formaient un peuple hautement évolué, en politique, dans les arts et le savoir. Englouti par un cataclysme extraordinaire, ce territoire disparu continue de faire couler beaucoup d’encre. Mythe ou réalité ? A-t-il réellement existé ? Difficile à dire, mais de nombreuses références attestent de son existence. Difficile à localiser aussi : les sources divergent puisqu’on le situe à différents points du globe. Certains le positionnent dans le fameux Triangle des Bermudes, d’autres en Islande ou au Spitzberg. D’autres encore aux Canaries.

J’ai eu plusieurs fois l’occasion de me rendre en Islande ainsi qu’au Spitzberg. Et, à vrai dire, je n’ai trouvé nulle trace, ni écrit sur cette civilisation qui reposerait maintenant au fond des océans. Cependant, il demeure un endroit où, plus qu’ailleurs, les spécialistes s’accordent à la situer : l’île de Santorini, en Mer Égée.

Les détectives de l’Atlantide

« Dans l’espace d’un seul jour et d’une nuit terribles, l’île de l’Atlantide s’abîma dans la mer et disparut. Voilà pourquoi, aujourd’hui encore, cet océan de là-bas est difficile et inexplorable, par l’obstacle des fonds vaseux et très bas que l’île, en s’engloutissant, a déposés ». Dans ses dialogues tardifs du Timée puis du Critias, Platon, le premier à en parler il y a déjà 2 400 ans, localise l’Atlantide à l’emplacement de l’île de Santorini (ou Santorin), proche de la Crète. Plus récemment et à l’instar de nombreux spécialistes, le Commandant Cousteau fit, lui aussi, des recherches entre Santorini et la Crète. De nombreux évènements ainsi que des fouilles minutieuses confirmeraient, dans cette région, l’existence d’un peuple très évolué : les Atlantes ?

L’Atlantide ne serait donc pas aussi légendaire qu’on le prétend ! Fait troublant : on sait que l’île de Santorini fut ravagée par un cataclysme d’une ampleur inimaginable entre 1 500 et 1 700 ans avant J-C. Une explosion d’une violence prodigieuse pulvérisa le volcan. Le cœur de l’île s’effondra sur lui-même, creusant ainsi un abîme sans fond à la place de la montagne. Dans la paroi de cette Caldeira, une brèche s’ouvrit et la mer s’y engouffra. Pendant plusieurs jours, ce fut les ténèbres. On retrouva des traces de cendres et de pierre ponce jusqu’en Crète. Comme si cela ne suffisait pas, un raz-de-marée d’une force extraordinaire déferla sur Santorini et la Crète. On pense que la vague infernale mesurait 200 mètres à sa naissance et 70 mètres quand elle s’écrasa sur les côtes. Cette catastrophe mit fin à l’une des civilisations les plus avancées de notre histoire : la civilisation Minoenne. Or, cette dernière semble avoir d’étranges similitudes avec l’Atlantide.

Mon imagination s’enflamme. Je rêve déjà de l’Atlantide et du Royaume de Minos. C’est décidé : je pars pour Santorini via la Crète, à la suite de Platon et de Cousteau ! Les fantômes des Atlantes et des Minoens m’attendent. Départ programmé en août. Je ne peux malheureusement pas embarquer avec moi la totalité de mon matériel de chasseur de fantômes. Je dois me contenter du strict minimum. Le poids de mes bagages étant limité.

Il est 16 heures, ce dimanche 13 août, quand mon avion se pose à Héraklion, capitale de la Crète. Premiers pas sur les terres du Roi Minos. La chaleur est écrasante. Je sens que je vais avoir du mal à m’adapter car je préfère le froid, les étendues brumeuses et la glace. Un couple d’amis m’accueille. Je logerai chez eux durant mon séjour. Avant d’entreprendre ce périple légendaire, je décide de recueillir quelques informations auprès de la population locale. Je dois aussi m’habituer au pays ainsi qu’au climat. Enfin, durant les trois jours qui vont suivre, j’ai quelques lectures de tarots à donner à des personnes qui sont au courant de ma présence sur l’île

Apparemment, les habitants du quartier savent déjà qui je suis et ce que je fais. Pour créer des liens, je leur propose quelques expériences de mentalisme : précognition, télékinésie et lectures de pensées. Je suis surpris de l’impact de ces démonstrations. Au fond de la pièce, une personne se signe ! Mais je gagne la confiance des habitants. Et, dès le lendemain, le bouche-à-oreille a fonctionné : mes démonstrations ont fait le tour du quartier.

Faux pas, faux bond ?

Mercredi 16 août. Au grand hôtel où travaille mon ami, je sirote un verre de Raki, la boisson locale. Il se fait tard. Nous décidons de rentrer. Alors que nous garons la voiture sur le parking, proche de la maison, je suis loin de penser qu’un drame va se jouer à quelques minutes et compromettre ainsi mes projets d’excursion…

Traversant la rue, je suis soudain surpris par une voiture qui file vers moi à toute allure. Je tente un demi-tour rapide mais glisse et m’écroule à terre, une vive douleur au pied. Gisant à terre, je constate avec horreur que mon pied est vraisemblablement cassé. Il s’est déplacé de 90 degrés et forme un angle droit avec ma jambe ! Et là, je commets l’erreur fatale : prenant mon courage – et mon pied ! – à deux mains, je le remets en place, d’un geste vif et brutal. Un bruit sec se fait entendre. La douleur est intolérable. Autour de moi, la rue commerçante est animée et l’atmosphère bruyante. Mon esprit s’embrume…

Avec l’aide de mon ami, je me traîne jusqu’au trottoir. Les témoins qui ont assisté à la scène m’apportent un siège et un sac de glace pour mon pied. Là, sur le trottoir, au milieu de l’effervescence, j’attends l’ambulance. Je me rassure en me persuadant que ce n’est qu’une vilaine foulure. Le quartier s’agite. L’ambulance tarde et la douleur monte. Les secours n’étant toujours pas là, Fredonas, un commerçant de la rue, décide de me conduire à l’hôpital universitaire. Mais pas question d’y aller seul : certains locaux veulent m’accompagner aussi. Nous sommes cinq dans la voiture et Yurgos, un autre commerçant, nous suit en scooter. Il restera d’ailleurs avec moi aux urgences une bonne partie de la nuit. L’accueil et la gentillesse des Crétois ne sont pas usurpés.

Il est minuit trente. À ma stupéfaction, il y a une foule incroyable aux urgences. Pas de chance : cette nuit-là, les accidentés de la route sont légions. Je prends alors mon mal… en patience ! Tentant d’oublier la douleur, je focalise mon esprit sur autre chose en faisant quelques expériences de mentalisme aux personnes qui m’entourent. Je lis l’étonnement dans le regard des personnes qui m’observent de loin. Je fuis le drame quelques minutes. Mais, je n’en peux plus d’attendre.

Il est quatre heures du matin quand je finis par voir un docteur. Il m’envoie passer une radio. Le verdict tombe alors comme un couperet : fractures multiples du pied nécessitant une opération chirurgicale avec, cerise sur le gâteau, pose d’une broche métallique dans la jambe. Le moral s’effondre pour un moment, d’autant plus que la douleur ne me quittera plus durant de longues semaines.

Je passe la nuit à l’hôpital. Demain, je déciderai si j’opte pour mon rapatriement en France ou pour l’intervention chirurgicale sur place. À cet instant précis, bien que je n’aie pas l’habitude d’abandonner, j’envisage la première option. Malgré les antidouleurs, la souffrance est lancinante. Je n’arrive pas à fermer l’œil de la nuit. Plusieurs questions me hantent : dois-je me résigner et abandonner ainsi la partie ? Le système de santé en Crète est-il performant ? Combien de temps vais-je rester immobilisé ? Si je reste, pourrais-je, malgré tout, explorer les mystères de cette contrée méditerranéenne, malgré les béquilles ?

L’aube efface les ténèbres. J’ai peu dormi. Et l’heure n’est plus à la réflexion mais à l’action. Je dois bientôt prendre une décision...

Les amis chez qui je loge me téléphonent pour prendre des nouvelles. Ils sont tous deux surchargés de travail pour le moment et ne peuvent s’occuper de moi. Ce que je comprends parfaitement. Cependant, me disent-il, si je décide de rester, je ne serais pas seul. Pour me rassurer, ils ajoutent que la structure hospitalière dans laquelle je suis est réputée pour son service orthopédique. Réputé ? Dans quelle mesure ? Je contacte mon assistance rapatriement et leur explique la situation. Pas très confiants pour l’instant, ils ne savent pas si l’hôpital dans lequel je suis répond à certains critères positifs pour ma santé. Ils doivent se renseigner. Mais j’ai besoin d’une réponse maintenant !…

L’équipe médicale entre dans ma chambre. Je suis toujours dans le flou sur l’efficacité du système de santé en Crète, et frustré de devoir capituler si près du but. Les fantômes de l’Antiquité m’attendent. Si je rentre en France, je leur fait faux bond. Hors de question ! Je suis peut-être blessé, mais pas sur mon lit de mort ! Et, selon le vieux proverbe, ce qui ne me tue pas me rend plus fort. Je tente le tout pour le tout et fais confiance à mon intuition : je reste !

Ce qui ne tue pas rend plus fort…

L’opération se passe bien mais les douleurs recommencent. J’ai enfin la confirmation, de source sûre, que l’hôpital où je suis possède le meilleur service orthopédique de toute la Grèce. J’apprends aussi que j’ai été opéré par un chirurgien qui jouit d’une réputation dépassant les frontières de la Crète. Mon intuition ne m’a donc pas trahie. Alité malgré moi, je passe le temps en essayant de communiquer avec Costa, mon voisin de chambre. Il ne parle que le Grec. Cela ne facilite pas les échanges, mais nous nous comprenons et le courant passe bien. Cela fait cinq mois qu’il est ici. Il connaît tout le monde. De ce fait, l’hôpital est vite informé de mes dons. Et c’est le défilé dans ma chambre ! Une fois de plus, je me retrouve à faire mes démonstrations de mentalisme, de lecture de tarot et de chiromancie, aux patients et au personnel de l’hôpital. Je dois l’avouer : tout le monde est sympathique avec le "frenchy" à la patte folle !

Je quitte enfin l’hôpital après huit jours d’immobilisation et retourne chez mes amis, absents durant plusieurs jours. Mais je ne suis pas seul. Yuko, une amie japonaise me tient compagnie. Mon voyage vers l’inconnu va enfin pouvoir commencer…

J’ai un peu surestimé mes capacités. J’ai quelques difficultés à me déplacer en béquilles. Les douleurs qui scandent la marche ne me permettent pas d’effectuer de longs trajets. De plus, la canicule qui sévit actuellement sur la Crète n’arrange pas les choses. Chaque déplacement équivaut à un chemin de croix. Qu’importe ! Je patiente quelques jours avant d’explorer le pays. Ce qui me laissera le temps, j’espère, de m’accoutumer à ce nouveau moyen de transport. Les douleurs seront moins intenses et la chaleur moins écrasante. Je mets alors à profit ces quelques jours pour me documenter sur les différents lieux à visiter.

Mauvais pied, bon œil !

À mon grand désespoir, je dois d’emblée abandonner l’idée d’aller sur l’île volcanique de Santorini, terre hypothétique des Atlantes. A deux heures de navigation de la Crète, l’endroit est trop escarpé et trop dangereux pour mes simples béquilles. Je suis frustré. Partie remise ! Je concentre donc tous mes efforts sur la Crète qui regorge, j’en suis persuadé, d’antiques mystères toujours perceptibles. Je caresse même l’espoir de croiser quelques spectres oubliés depuis longtemps, au détour de quelques temples millénaires…

À quelques kilomètres de mon point de chute (si j’ose dire !) se trouve le palais du Roi Minos, Knossos, là où, selon la légende, fut enfermé le terrible Minotaure. Mais ce lieu "mythologique" étant une pièce de choix, je réserve son exploration pour la fin, lorsque je serais plus à même de me déplacer avec mes satanées béquilles.

Cela fait maintenant 17 jours que je suis en Crète. J’ai du mal à supporter l’inactivité. Mes amis sont de retour pour quelques jours. Nous décidons d’une première sortie ensemble. Cap dans le centre de la Crète, vers la plaine de la Messara où se situent Gortyne et Phaestos.

Habitée depuis 6 000 ans, Gortyne est une ancienne cité romaine où, dit-on, Zeus aima la belle Europe sous un arbre dont on peut encore voir l’arrière-arrière-petit-platane. De ces amours naquirent trois fils : Eaque, Rhadamanthe (fondateur de Phaestos) et Minos, futur roi de Knossos. On raconte que ce platane a la particularité de ne plus perdre ses feuilles. Mais je n’ai pas la patience d’attendre l’automne pour le vérifier ! Sur ce site, gravées sur la pierre, en dialecte Dorien Crétois, se trouvent les fameuses "Lois des Douze Tables de Gortyne" découvertes il y a maintenant 120 ans. Il s’agit d’un texte législatif traitant des questions juridiques liées à la liberté individuelle, au droit à la propriété, au mariage, ainsi qu’à divers aspects de la vie en société. C’est le texte de loi le plus complet du monde Grec et aussi le plus ancien code urbain d’Europe. La légende dit aussi que c’est à Gortyne que naquit le terrible Minotaure, de l’union de Pasiphaé, femme de Minos, et d’un taureau.

Phaestos, quant à elle, fut la citée Minoenne la plus puissante après Knossos. Érigée en 1 900 avant J.C., elle fut détruite deux siècles plus tard par le terrible cataclysme qui ravagea la plupart des palais Minoens. Nous atteignons les ruines de Phaestos. Je sais déjà que mon périple va être dur. Effectivement, je dois avancer péniblement sur un chemin dont le dénivelé rend difficile la marche en béquilles. Mais c’est le prix à payer si je veux être au cœur de ces pierres millénaires pour ainsi m’imprégner de leurs mystères. C’est la fournaise et le soleil me tue à petit feu. Le chemin qui mène aux ruines est de plus en plus difficile. Mes douleurs reprennent. Résigné, je dois faire demi-tour. Avec amertume, je contemple, d’où je suis, ces ruines si proches et pourtant inaccessibles au piètre marcheur que je suis devenu. J’aurais tant voulu ressentir l’atmosphère de cette cité antique. Cité dans laquelle fut découvert l’énigmatique "Disque de Phaestos". Gravé de 242 pictogrammes en spirale, ce disque d’argile reste encore indéchiffrable à ce jour. Il est exposé au musée d’Heraklion (vitrine 41, salle III).

Je dois être lucide. Il est encore trop tôt pour explorer en profondeur les secrets de l’Antiquité. Nous passons par Matala pour nous reposer et prendre un verre avant de clore cette journée.

Yuko

Pour la plupart des gens, parler des fantômes n’est pas toujours facile, surtout si on habite soi-même dans une maison hantée. Sur le chemin du retour, Yuko, la perle d’Asie avec qui j’ai fait maintenant plus ample connaissance, ose me parler de la petite maison dans laquelle elle vit à Hania. Cette charmante ville à l’architecture vénitienne, située au nord-ouest de la Crète, recèle quelques secrets qu’il me tarde à mettre à jour. Yuko qui loge dans la vieille ville me confie, à demi-mots, que sa maison est hantée. Mon sang ne fait qu’un tour. J’exulte déjà à l’idée de m’y rendre dans quelques jours. En attendant, j’exige de Yuko qu’elle m’en dise le moins possible. Les seules informations dont je dispose remontent à l’ancien locataire, un vieil homme mort il y a six mois d’une maladie qui l’avait cloué au lit. Après lui, la maison fut inoccupée pendant quelques temps, faute de repreneur assez téméraire pour braver la rumeur de hantise…

Arrivé à Hania, je déambule dans les rues étroites et animées de la vieille cité. Je respire l’atmosphère du vieux port, avec son phare vénitien construit au 16ème siècle. Étant donné ma vitesse de croisière, j’ai largement le temps d’admirer les façades des vieilles maisons vénitiennes et ottomanes. Je contemple ces murs centenaires qui, léchés par la lumière du soleil, rendent l’ambiance chaleureuse. Epargnées par les siècles, ces habitations m’invitent à un véritable voyage dans le temps. Seule ombre au tableau : la ville est infestée par un parasite qui fait son apparition, chaque année, en juillet et en août : le "Touristus Vulgarus" ! L’astre solaire se cache derrière l’horizon et laisse la nuit prendre possession de la cité.

Le matelas hanté

Après avoir erré dans ces ruelles envoûtantes, nous voici arrivés dans la rue Portou, là où se situe la maison aux esprits. J’entre au numéro 26.

Alors que la rue est accueillante et chaleureuse, l’atmosphère à l’intérieur du bâtiment change subitement. La température est froide et les ténèbres semblent avoir définitivement élu domicile entre ces murs. Un sentiment de tristesse, très fugace, me surprend. Mais, pour l’instant, je ne ressens rien d’étrange : aucune présence spectrale ne s’offre à mes sens, pourtant en alerte. Je me trouve au centre d’une pièce au confort spartiate : une petite table, une chaise, une commode, une grande armoire et, au centre, le fameux lit dans lequel la grande faucheuse est venue prendre le dernier souffle du vieil homme. Au fond, j’aperçois quelques marches qui desservent la cuisine et la salle de bain.
Mes amis me laissent seul. Je m’assois sur le lit, pensant ainsi ressentir des vibrations. Mon troisième œil est à l’affût de la moindre présence suspecte. Après plus de deux heures passées dans cette demeure, je ne ressens toujours rien.

Avant de céder aux caprices de l’imagination, je rejoins mes amis. Nous devons prendre la route, encore longue : 150 kilomètres avant de regagner nos pénates. Il est déjà une heure du matin.

Yuko me raconte en détail les évènements étranges qui sont survenus au 26 rue Portou, durant les six derniers mois. Avant de louer cette habitation, elle a eu connaissance, par la propriétaire, de la mort du vieil homme et du fait bizarre que personne ne voulait habiter l’endroit. Sauf elle…

Sitôt emménagée, les voisins lui demandent de ses nouvelles. Hormis quelques frissons, rien d’étrange ne vient troubler sa tranquillité. Du moins, pas encore... Ses amis lui conseillent néanmoins de changer le matelas du lit. Il a quand même "vu" mourir le vieil homme ! Bien qu’elle ne soit pas superstitieuse, elle suit ce conseil et, n’ayant pas la possibilité de le transporter en dehors de chez elle pour le moment, elle entrepose le matelas sous le lit. Mais, peu à peu, l’atmosphère de la maison va changer…

Se sentant observée par une présence invisible, particulièrement aux abords du lit, elle est gagnée rapidement par la nette impression de n’être plus toute seule. Même ses amis qui viennent lui rendre visite ne sont pas complètement à l’aise. Plus réceptif, l’un d’eux se sent perturbé et reste près de la porte d’entrée.

Parfois, la maison semble protester contre l’intrusion de cette nouvelle locataire. En plein milieu de la nuit, des bruits proviennent de la salle de bains. L’eau du robinet s’arrête subitement de couler. Un autre soir, c’est l’ampoule de la cuisine qui ne fonctionne plus. Elle s’éclaire donc à la bougie. Mais alors, la flamme se met à vaciller avant de s’éteindre brusquement. Bien sûr, aucun courant d’air n’est perceptible à ce moment précis. Plus étrange encore : dès que Yuko s’allonge sur le lit, il semble vouloir l’emprisonner. En effet, gagnée par une fatigue subite, elle sombre dans un profond sommeil alors qu’elle était parfaitement éveillée quelques instants plus tôt. Elle me dit avoir ressenti la désagréable sensation que le lit "aspirait son énergie". Ses amis qui la croisent après une bonne nuit de sommeil la trouvent changée physiquement. Elle paraît complètement harassée, plus vieille et avec les cheveux ternes.

Elle se souvient alors du vieux matelas entreposé sous son lit. Sans faire le lien direct avec les évènements étranges, elle décide de le jeter pour "éviter qu’il ne prenne trop la poussière". À sa grande surprise, le matelas paraît anormalement lourd, comme s’il ne voulait pas quitter la maison. Est-il encore habité par l’esprit du vieil homme ? Dès lors que le vieux matelas est loin, la maison redevient plus paisible et Yuko plus sereine. Mais un dernier événement vient clore cette troublante affaire.

Le dernier adieu

Le soir du déménagement du matelas, Yuko est installée à la petite table de la pièce, absorbée dans l’écriture d’une lettre. Plus que d’habitude, elle se sent observée. Elle n’est pas seule ! Ce sentiment ne la quitte plus. Soudain, des frissons lui parcourent l’échine et la frayeur s’empare d’elle. À sa droite, un vieil homme courbé, aux cheveux poivre et sel, et affublé d’un long manteau gris, se tient debout à quelques centimètres. Elle se tourne pour le décrire plus en détails, mais il disparaît aussi brutalement qu’il était apparu. Qui était-il ? Que voulait-il ? Quel était le sens de sa présence ? Etait-ce le spectre du vieil homme décédé quelques mois auparavant ? On ne le saura sans doute jamais…

La guerre des spectres

Sur le versant sud de l’île qui fait face à Hania se trouve le château vénitien de Frangokastello que l’on dit hanté. Je ne peux malheureusement pas m’y rendre, ma mobilité réduite m’en empêchant. Mais voici les faits tels qu’ils m’ont été rapportés :

L’emplacement de cette forteresse, dont la construction commença vers 1340, est étonnant. Ce château se situe sur une magnifique plage de sable blanc, face à la mer. Il fut érigé à l’emplacement de l’église Saint Mark. On remarque d’ailleurs le relief du lion de Saint Mark sur la barrière à l’entrée. Il fut le théâtre de nombreuses batailles. Datant de 1828, l’une des plus sanglantes opposa 700 Crétois à 8 000 Turques !

On raconte ici que ce sont les âmes tourmentées des soldats, tombés durant le combat, que l’on peut croiser aux abords de la forteresse. Cependant, ceux-ci n’apparaissent qu’à une période bien précise. Chaque année, durant le mois de mai, vous pouvez rencontrer chaque matin, à l’aube, une armée d’ombres en tenue de guerrier, longeant les murs du château. Des cavaliers peuvent aussi être aperçus sur le trajet de l’église Saint-Haralambus à Frangokastello. Ce phénomène dure pendant dix minutes puis s’évanouit. Les plus sceptiques attribuent ces scènes spectrales à des mirages. C’est une vision comme une autre, si je puis dire ! Durant la seconde guerre mondiale, les soldats allemands furent les témoins effrayés de cette armée fantôme. Ils la considéraient comme une force surnaturelle envahissante. Je ne me prononcerais pas sur l’étrangeté de ces apparitions, car je ne peux m’y rendre pour une enquête approfondie. Je vous laisse donc seul juge de ce phénomène. Et si, par hasard, le destin vous mène jusqu’à Frangokastello, faites-moi part de votre expérience…

Les fantômes font de la résistance

Les jours passent. Ma jambe me fait moins souffrir. Comme les douleurs s’espacent, je parcours un peu plus de distance chaque jour. Avec l’aide de mes amis, je décide donc d’explorer plus en profondeur l’île et ses secrets. Nous mettons le cap sur le monastère de Preveli. Coupé du reste du monde, cet édifice religieux est isolé en haut d’une montagne. Avant de l’atteindre, nous faisons un détour par le village d’Anogia, perdu lui-aussi dans les montagnes. Centre historique de la résistance, ses habitants, épris de liberté, luttèrent farouchement contre l’envahisseur allemand, durant la seconde guerre mondiale. Le prix à payer fut lourd. L’armée d’Hitler incendia la commune et fusilla tous les hommes du village. Nous grimpons prudemment les cols de la montagne car la route est dangereuse. Aucun garde-fou ne sécurise la chaussée. Le moindre faux pas, la moindre embardée, et c’est le plongeon vertigineux !

Au fur et à mesure que nous approchons du bourg, je remarque d’étranges signes sur les panneaux de signalisation. Ils sont clairsemés de trous percés… à l’arme à feu ! Il parait que c’est le jeu favori des locaux ! Nous pénétrons dans le village avec la sensation de remonter le temps. Nous nous arrêtons sur la petite place du village pour prendre un verre. Autour de nous, des habitants vendent leurs produits artisanaux. Je ne sais pas encore pourquoi, mais je ressens quelque chose d’inhabituel dans ce décor d’un autre temps. Après quelques instants d’observation, je comprends pourquoi : les hommes du village, du moins les plus anciens, sont tous vêtus de noir : chemise, pantalon cintré dans sa partie inférieure et bottes de cuir qui remontent jusqu’à mi-jambe. Tous sont affublés de l’uniforme de la résistante crétoise ! Étonnant ! Et ne leur dites surtout pas que c’est du folklore. C’est leur manière de nous faire comprendre qu’ils ont résisté à l’ennemi à travers les siècles et qu’ils résisteront encore. Dernier détail qui a son importance : ils sont tous armés jusqu’aux dents ! Pour s’entraîner sur les panneaux ?

L’ombre d’un monastère ou le monastère des ombres ?

Après cette brève incursion dans le passé, nous reprenons la route vers notre destination : le monastère de Preveli. En chemin, nous passons les gorges de Kourtalioti, deux parois abruptes et gigantesques. Au-dessus de nos têtes, des aigles volent majestueusement. Impressionnant ! Dans le col qui nous mène au monastère orthodoxe, je ressens une infinie mélancolie à la vue d’un bloc de ruines, perdu dans les broussailles. Il me paraît "habité", bien qu’abandonné depuis la dernière guerre. L’accès semblant dangereux, il m’est impossible d’y pénétrer avec mes béquilles. En outre, des grilles en interdisent l’accès, comme pour emprisonner à tout jamais les fantômes qui veillent sur cette bâtisse rocailleuse, premier ensemble de l’édifice religieux qui en comprenait initialement deux.

Quelques minutes après, nous pénétrons dans l’enceinte religieuse, toujours en activité. Le panorama sur la mer est magnifique. Outre des moines, l’endroit est habité par des chats errants et, surtout, par un silence "assourdissant". L’endroit qui s’offre à mes yeux me surprend. Ce sont deux monastères qui semblent cohabiter : le nouveau, occupé par la communauté religieuse, et l’ancien, à l’abandon. Ce dernier pique bien évidemment ma curiosité au vif. Je m’en approche. Des panneaux mettent en garde le visiteur : "Attention danger" !

En outre, avec mes béquilles, je manque de discrétion et les prêtres qui rôdent continuellement contrarient mon avancée. Une vieille porte, ornée de deux croix blanches sommairement dessinées, m’intrigue fortement. Un accès vers un autre monde ? Non loin de là, une fenêtre en ruines obstruée par deux planches de bois, où je réussis, tant bien que mal, à passer la tête. La pièce est plongée dans les ténèbres et mes yeux devinent quelques formes immobiles. A nouveau, je suis frappé par ce même sentiment de mélancolie. Car j’ai la nette conviction que des âmes errantes hantent ce lieu. Les moines gardent un œil sur moi. Je fais demi-tour et me dirige vers l’église. À l’intérieur, on peut voir de nombreuses icônes, un chandelier d’argent imposant et une croix d’or sertie de diamants. Je suis épuisé. Les douleurs reprennent. Il est temps de partir…

Sur les traces du Minotaure…

Les jours s’égrènent sous le soleil crétois. Il est peut-être temps pour moi de franchir la frontière qui sépare le mythe de la réalité, en me rendant dans la plus ancienne cité de toute la Grèce, celle qui fut le joyau de la civilisation Minoenne et le royaume de Minos, là où fut enfermé le terrible Minotaure, monstre à corps d’homme et à tête de taureau, né des amours contre-nature de la reine Pasiphae et d’un taureau : j’ai nommé la puissante cité de Knossos ! Labyrinthe de corridors, de cours, de chambres, d’escaliers et d’étages, appartements royaux et de sanctuaires, cet immense palais, mis à jour à l’aube du 20ème siècle par l’archéologue britannique Sir Arthur Evans, ne comptait à l’origine pas moins de 1 300 pièces ! Cette découverte marqua un tournant décisif dans la connaissance de la civilisation minoenne. On ne peut s’empêcher de faire le lien avec l’Atlantide tant les similitudes sont nombreuses.

La légende - mais est-ce tout à fait une légende ? – nous apprend que c’est l’architecte de Minos, le fameux Dédale, qui imagina l’incroyable plan du labyrinthe pour y enfermer l’effrayant Minotaure. L’impitoyable roi Minos, fils de Zeus, avait pour habitude de jeter ses ennemis en pâture à la Bête. Égée, le roi d’Athènes qui fit assassiner le fils de Minos, l’apprit à ses dépens. Pour ce meurtre, il dut se plier aux exigences du monarque Crétois qui exigea un tribut de sept garçons et de sept filles, tous les ans (ou tous les neuf ans, les sources divergent), pour nourrir l’appétit du monstre. Pour en finir avec cette abomination, les Athéniens envoyèrent, parmi les victimes désignées, Thésée, le fils d’Égée. Sa mission : tuer le Minotaure. Grâce à la complicité de la belle Ariane, la fille de Minos séduite par le jeune éphèbe, Thésée sortit vainqueur de ce combat. En effet, Ariane donna au fils d’Égée le plan du labyrinthe, obtenu en secret de Dédale, ainsi que le fameux fil qu’il déroula pour retrouver le chemin du retour. En punition de cette trahison, Minos enferma Dédale et son fils Icare dans les profondeurs du palais. Mais, l’architecte très ingénieux fabriqua deux paires d’ailes avec des plumes collées à la cire. Ainsi, ils purent s’enfuirent de Crête. Malheureusement, enivré par le plaisir de voler, Icare s’approcha trop près du soleil faisant fondre la cire de ses ailes. Sa chute le précipita dans la mer, près de l’île qui porte aujourd’hui son nom, Icaria. Quant à Dédale, il réussit à gagner Cumes, en Italie. Minos le poursuivit, en vain. A sa mort (il finit ébouillanté et étouffé !), le roi Minos régna sur le territoire des ombres, devenant ainsi, avec Éaque et Rhadamanthe, l’un des juges des Enfers que Dante décrit, en ces termes, dans sa Divine Comédie :

« A l’entrée du second cercle, Minos se tient là, horrible et grinçant des dents ; il examine les fautes, il juge et assigne les places. Je veux dire que lorsque l’âme maudite comparaît devant lui, elle se confesse entièrement, et cet inquisiteur des péchés voit quel lieu de l’enfer lui convient ».

Voyage sur le fil… du temps !

Les rayons solaires pouvant se révéler redoutables, on me conseille de ne pas arriver à Knossos en plein après-midi. Mais je n’ai pas le choix. Je dois partir maintenant vers le sud-est d’Héraklion si je veux commencer la visite assez tôt, même si, avec Yuko, j’atteins la cité aux mauvaises heures.

Brûlé par un soleil écrasant, le paysage est aride. Nous franchissons les grilles du temple. Cette visite promet un retour à une époque où les dieux vivaient encore parmi les hommes. Plus qu’une centaine de mètres et je serai enfin au sein des ruines de l’antique Knossos, plus de 3 500 ans après la célèbre légende. Un léger vent frais calme les ardeurs du soleil. Par chance, le site n’est pas trop envahi par les touristes. De toute façon, ils deviennent invisibles au fur et à mesure de ma progression pour ne laisser place qu’aux fantômes du passé. J’arpente les cours, les propylées, les couloirs et les magasins dans lesquels sont entreposés les Pythoïs, réservoirs d’huile et de vin. Devant les fresques qui nous renseignent sur la grande qualité artistique de ce peuple, je suis littéralement subjugué par l’étonnante architecture, résolument moderne, de cette cité dont les premières pierres datent de 2 200 ans avant J.C.

On pourrait facilement se croire dans une résidence contemporaine. D’autant plus que ces merveilles architecturales possédaient déjà l’eau courante ! Je peux témoigner de la présence des canalisations en terre cuite qui jalonnent le site. Ce palais est un véritable complexe urbain autonome. Cependant, on ne peut se tromper. Nous sommes bien là dans un lieu plusieurs fois millénaire. La présence des fantômes Minoens se fait sentir. Ce lieu est chargé émotionnellement. Pour s’en convaincre, il suffit d’ouvrir l’œil, le troisième de préférence ! Comment est-il possible qu’une civilisation pacifique ait déjà pu s’épanouir et construire ses premiers palais vers 2 200 avant J.C. ? On sait aussi que cette cité contrôlait une société très hiérarchisée et extrêmement raffinée, où les arts avaient partout la meilleure place. Pour s’en convaincre, il suffit d’admirer le célèbre Rython (vase) de stéatite noire en forme de tête de taureau. Avec son œil en cristal de roche, ses cornes d’or et son mufle souligné de nacre, il était dédié aux grandes cérémonies. Celui de Knossos est maintenant exposé au musée d’Heraklion (vitrine 51, salle V).

C’est en plongeant au cœur de la civilisation minoenne que nous prenons conscience d’une chose : depuis les temps anciens, l’évolution de l’homme est cyclique ! Les Darwiniens affirment que l’homme est en progrès constant depuis un "point zéro" et qu’il n’a jamais été autant accompli que de nos jours. Je ne suis pas d’accord. Je me trompe peut-être mais j’ai le sentiment que nous avons aujourd’hui tout à gagner de profiter de nos expériences passées pour assurer notre développement actuel. Les civilisations anciennes montrent des signes indéniables d’évolution. Knossos en fait partie. Or, j’ai l’impression que lorsqu’une civilisation a atteint son apogée, elle s’est effondrée, pour céder la place à une nouvelle génération en devenir. Et ainsi de suite. Je ne peux m’empêcher de faire un lien avec l’Atlantide qui n’avait rien à envier à notre civilisation actuelle, tant son organisation semblait parfaite.

Egaré dans ce dédale de pierres, mon intuition me dit que le continent perdu n’est pas si perdu que ça.

Plus j’avance dans les ruines du palais de Minos, plus je prends conscience qu’il est difficile d’établir une frontière nette entre le mythe et la réalité. Les deux se confondent, s’interpénètrent continuellement. Au cœur de ces pierres, vous n’êtes plus sûr de rien… C’est un véritable labyrinthe qui s’offre à mes yeux… Labyrinthe qui fut la prison du terrible Minotaure ? On pourrait le croire… Mais le Minotaure a-t-il réellement existé ? Gardez à l’esprit que dans chaque légende se trouve un fond de vérité…

J’arpente le site depuis bientôt deux heures. Difficilement bien sûr, car mes béquilles ne me facilitent pas la tâche. Les pièges sont nombreux. J’évite quelques crevasses et maintiens mon équilibre précaire sur des marches peu larges. Je prends des risques et manque de chuter plusieurs fois.

Mais je tiens le coup et décide de faire une pause dans la grande cour, là où se déroulaient vraisemblablement les jeux tauromachiques. Séduit par l’atmosphère hypnotique de ce lieu magique, je pense à la disparition brutale de cette brillante civilisation, entre 1 450 et 1 375 avant J.C., et songe aux catastrophes naturelles qui furent plusieurs fois responsables de la destruction des palais minoens. Mais le coup fatal fut porté par l’explosion du volcan de l’île de Santorini. Ce même volcan qui a sans doute fait disparaître le peuple des Atlantes…

Touristus Vulgarus

Perdu dans mes pensées, je balaye du regard la cité qui fut autrefois la plus puissante de Crète. Quand, sortant brusquement de ma léthargie, je suis irrémédiablement attiré par une partie de la construction. Tout mon être se sent happé vers cet endroit. Je traverse la grande cour et me retrouve devant l’entrée d’une salle, bouchée par une horde de touristes, caméras au poing. Fuyant habituellement le monde, j’aurais dû faire demi-tour. Mais là, impossible de bouger. Une force indéfinissable me pousse à rester. Après cinq longues minutes, les touristes quittent les lieux. Je m’approche alors et entre dans le sanctuaire. Nul doute : ce lieu est hanté ! Je ne sais pas encore par quoi, ni par qui, mais mes intuitions sont formelles. Et elles me trahissent rarement…

A l’autre extrémité de la pièce, j’aperçois une autre entrée. C’est la salle du trône qui renferme le trône d’albâtre sur lequel prenait place la grande prêtresse lors de rituels aujourd’hui oubliés. Sur les murs, des fresques à motifs de Griffon. Suivant mon instinct, je suis convaincu que la pièce est "vivante" : si des entités hantent ce palais, je suis bien au cœur de la hantise ! L’accès à cette chambre m’est malheureusement interdit : une barrière assez haute sert de frontière avec l’autre monde. À tout hasard, je prends quelques photos et tente d’ouvrir mon sixième sens au monde de l’invisible. Ma "connexion" se trouve vite interrompue par le retour intempestif des troupeaux de touristes. Résigné, je bats en retraite. Cela fait maintenant deux heures et demie que je suis là. J’ai exploré les deux tiers du site. Ereinté, je ne peux hélas aller plus loin. Il est temps de quitter les lieux.

Oups, un orbs !

Sur le chemin du retour, les images de Knossos continuent de me hanter. Arrivé devant mon ordinateur, je télécharge les prises de vues de la journée et prolonge ainsi ce voyage dans le passé. Et là, c’est la stupéfaction : sur l’une des photos prises, sans trucage, dans la fameuse salle du trône, apparaît un orbs !

Selon la définition des parapsychologues, un orbs est une boule d’énergie censée représenter une entité. Elles apparaissent très souvent dans les lieux hantés. Cependant, les orbs sont très controversées.

Un œil non averti (ou une mauvaise langue !) pourrait aisément les confondre avec une particule de poussière ou de pollen, en suspension dans l’air et sur laquelle se réfléchit le flash de l’appareil photo. Cela peut être aussi la simple réflexion de la lumière sur l’objectif de l’appareil. Cependant, ayant étudié ce phénomène de près, je peux affirmer que cela ne correspond à aucune de ces options sceptiques. Est-ce un fantôme ou une entité psychique indépendante de notre volonté ? Je ne m’aventurerai pas de manière catégorique sur ce terrain délicat car, de surcroît, une photo ne fait jamais office de preuve. Elle fait office de témoin bien involontaire pour rendre compte de l’étrangeté de notre monde. Ce dont je suis sûr, c’est qu’il est étonnant pour moi de capturer ce phénomène anormal alors que mes ressentis sont intenses au même endroit. D’autant plus étonnant que cette manifestation est fréquente dans les lieux hantés. C’est ce qu’on appelle, à mon sens, une coïncidence significative.

Au revoir, Knossos la puissante ! Au revoir et non adieu car je reviendrai pour explorer davantage ta part d’ombre…

Après un mois et une semaine de séjour en Crète, je pense avoir été jusqu’au bout de mes possibilités, compte tenu de ma mobilité toute relative. Il m’est difficile de pousser plus en avant ma visite de l’île des Dieux. Il est temps pour moi de retrouver l’hexagone. En attendant mon retour, je goûte à la vie nocturne crétoise ainsi qu’aux nombreux lounge cafés qui pullulent sur l’île. Néanmoins, je dois reconnaître que tout ceci manque cruellement de saveur quand on a côtoyé les mystères de l’Antiquité. Enfin, je prends le temps de visiter le musée archéologique d’Héraklion qui contient quelques merveilles de cette civilisation hautement évoluée mais aujourd’hui disparue… Civilisation qui n’est peut-être que la réminiscence de ce continent que l’on appelle… Atlantide !

E.F.

N.B. : Je voudrais remercier Marie, Ludovic et Tassoula pour leur aide précieuse durant mon séjour.

Je tiens aussi à remercier tout particulièrement Yuko, la perle du pays du Soleil Levant. Sans sa présence, mon séjour aurait été, sans aucun doute, de courte durée.

Enfin un grand merci à Fredonas, Yurgos, Costa, Greco, au personnel de l’Hôpital Universitaire d’Heraklion ainsi qu’à tous les Crétois avec qui j’ai partagé ces aventures, à l'exception du chauffard qui a pris la fuite…

Crédits photographiques Crète : Yuko T. et Erick Fearson
Photo d'illustration du mythe de l'Atlantide : Olivier Valentin

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