>> Entretien avec Jean Marigny, spécialiste du mythe du vampire

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Il est le prince des ténèbres, le non-mort. Il suffit que son image s’incruste dans votre esprit pour hanter vos nuits à tout jamais. Depuis plus d’un siècle, il terrorise les simples mortels que nous sommes ! Qui est-il ? Dracula bien sûr … Les vampires ne sont-ils qu’un mythe ? Descente aux enfers.

De notre correspondant dans sa tombe, Erick Fearson

De tous temps et dans toutes cultures, l’homme a cru aux vampires, de même que des personnages éminents croient fermement à l’existence des vampires, tel le fameux philosophe Jean Jacques Rousseau qui déclarait un jour : « s’il y a dans ce monde une histoire attestée par des preuves, c’est bien celle des vampires. Rien n’y manque : rapports officiels, témoignages de notables, de médecins, d’ecclésiastiques, de juges ; sur tous les points nous disposons de preuves juridiques. ». Colin Wilson, auteur du best-seller « L’occulte », partage le même avis : « il doit y avoir une raison pour que ces histoires de vampires se soient soudainement répandues en Europe. Il est évident que quelque chose a dû se passer et il semble peu probable que cela été pure imagination…

Les exemples de vampirisme sont si bien authentifiés qu’il serait absurde d’essayer de conserver une position strictement rationaliste. ».

Fiche d'état civil

Les vampires sont des morts vivants se nourrissant de sang. Ils sortent de leur cercueil la nuit à la recherche d'éventuelles victimes avec une nette préférence pour les belles jeunes filles, plante leurs canines acérées dans leur cou et sucent le breuvage d’immortalité jusqu'à plus soif. La pauvre victime devient à son tour vampire. Le vampire craint la lumière du soleil, l’eau bénite, la croix et l’ail. Son image ne se reflète pas dans les miroirs. Il a le pouvoir de se transformer en chauve-souris ou en loup. La manière la plus sure de le tuer est encore de lui enfoncer un pieu dans le cœur ou de lui tirer une balle d’argent.

Bram Stoker, un écrivain vampirisé


Max Shreck dans le rôle du Nosferatu de F. W. Murnau

Cependant, au sein de la population occidentale de la fin du 19ème siècle, s’estompent les croyances liées au vampirisme. Pourtant un homme va changer cet état de fait. Cet homme, c’est Bram Stoker (1847-1912), dont le chef d’œuvre « Dracula » restera gravé dans toutes les mémoires. Il est le plus célèbre des vampires. Publié en 1897, il reste encore à notre époque le livre le plus lu au monde après la bible. Dracula est, dans l’écriture, novateur pour son époque. Mêlant habilement la réalité et la fiction, ce monument littéraire au romantisme macabre sublime trois tabous : la mort, le sexe et le sang. L’impact de Dracula fut tellement puissant que ce personnage est devenu l’archétype du vampire. Aujourd’hui, tous les vampires de romans s’inspirent plus ou moins du héros de Stocker, bien qu’il existât déjà des histoires de goules aux dents acérées, avant la sortie des aventures du sombre Comte. Citons pour exemple « Carmilla » de Sheridan le Fanu, « La Morte Amoureuse » de Théophile Gautier, « Varney the Vampyre » de James Malcom Rymer, ou encore « The Vampyre » de John Polidori (il fut, à tort, attribué à l’époque à Lord Byron).

Pour la petite histoire, sachez que Bram Stocker fit des recherches et écrivit une bonne partie de son œuvre à Whitby, station balnéaire située au Nord-Est de l’Angleterre. Cette ville est d’un grand intérêt pour tout passionné du Comte aux longues canines. Plusieurs scènes du roman se déroulent dans cette ville côtière. De plus, l’office du tourisme offre aux visiteurs une carte du parcours de Dracula. Je me suis rendu à Whitby pour, avant tout, enquêter sur sa fameuse abbaye hantée, et il est vrai que l’atmosphère fantastique et mélancolique qui y règne est propice à l’écriture d’un roman gothique.

Un prince qui ne manque pas de piquant...

Beaucoup s’accordent pour dire que Bram Stocker s’inspira d’une authentique figure historique pour écrire son roman. Celle de Vlad Tépès dit « l’Empaleur », prince de Valachie, qui régna au 15ème siècle et dont la cruauté fut sans limite. Celui-ci faisait empaler toute personne lui désobéissant puis les faisait exposer ainsi sur ses terres à la vue de tous. Inutile d’ajouter que l’ordre et la loi régnaient sur le pays. Le prince roumain aimait dîner parmi des cadavres et buvait du sang humain. Il était hémophage. Un soir, lors d’un repas, l’un de ses invités lui fit remarquer qu’il était incommodé par l’odeur des cadavres en décomposition. « Je vais arranger ça » répliqua Vlad. Il fit empaler son invité et le hissa bien au-dessus des autres torturés en lui criant : « tu peux respirer l’air pur, maintenant ». Quel sacré sens de l’humour !
On raconte aussi qu’un jour Vlad invita les malades et les pauvres à un grand banquet puis à la fin de ce repas, leur demanda s’il pouvait leur être utile. Ces derniers répondirent qu’ils aimeraient être soulagés de leurs soucis quotidiens. Le prince fit fermer toutes les portes et les fenêtres et ordonna à ses sbires de mettre le feu à la salle. Tous ces pauvres hommes furent brûlés vifs. Ainsi, d’après ce monstre, ils étaient débarrassés de leurs soucis pour l’éternité.

L’hypothèse selon laquelle Bram Stoker s’inspira de l’histoire de Vlad Tépès pour écrire son roman est vraisemblablement fausse. Cette théorie s’est surtout développée en 1972, à la sortie de l’ouvrage de Raymond Mc Nally et Radu Florescu « In search of Dracula ». Mais aucune preuve ne vient étayer cette supposition, même si on peut faire des liens étroits entre le personnage historique et celui de fiction.

Bain de sang

Au même titre que Vlad Tépès, la comtesse polonaise Elisabeth Bathory se rendit célèbre par son vampirisme et ses crimes atroces. Elle pensait préserver sa jeunesse en se baignant dans le sang chaud de jeunes vierges. Ainsi, on estime à plus de 650 le nombre de ses victimes. En 1611, elle fut jugée et condamnée à être emmurée dans son château pour le restant de ses jours.

Le vampire de Highgate

Aujourd’hui encore, en différents point du globe, des faits divers liés au vampirisme se déroulent chaque jour. Le plus célèbre d’entre eux est sans doute l’affaire qui secoua la Grande Bretagne dans les années 1970, mettant en scène David Farrant, président de la société britannique d’occultisme. Voici les faits :

M. Farrant déclare dans une interview qu’un vampire de plus de deux mètres fut aperçu dans le cimetière de Highgate. C’est la ruée. Plus d’une centaine de chasseurs de vampires s’y donnent rendez-vous. Des tombes sont profanées et des cadavres sont découverts avec un pieu planté dans leurs chairs. La police perquisitionne chez David Farrant et trouve des photos mettant en scène des cérémonies occultes se déroulant au cimetière de Highgate. Il fut tenu responsable de ces actes de vandalisme, fut jugé et passa deux années en prison. Le cimetière de Highgate était-il réellement habité par un vampire ? Sean Manchester, évêque de son état, confirme cette thèse, puisque d’après ses dires, il se trouva directement confronté à lui et en vint à bout au terme d’une lutte acharnée.

Un oignon de trop !

En janvier 1973, à Stoke-on-Trent en Angleterre, la police effarée découvre le cadavre d’un homme, mort dans d’étranges circonstances. L’homme d’origine polonaise, un certain Demitrious Myiciura, gît à son domicile. La pièce est recouverte de sel. Un sac de sel est posé entre ses jambes. Sur le bord de sa fenêtre repose un bol dans lequel se trouve un mélange d’ails et d’excréments humains. L’enquête conclue que cet homme est mort étouffé par un oignon mariné. L’agent de police qui a découvert le corps et qui ne peut accepter cette conclusion décide d’approfondir l’affaire et consulte l’ouvrage « Histoire naturelle du vampire » d’Anthony Masters. Ses soupçons sont confirmés. Le sel et l’ail sont des armes puissantes contre les vampires. Le mélange provenant du bol, étant destiné à attirer ces créatures de la nuit, pour être ensuite empoisonnées par l’ail. Le coroner pratique un nouvel examen et découvre que le supposé oignon est en fait une gousse d’ail ! D’après le médecin légiste, cet homme n’était pas fou, n’a pas essayé de se suicider et avait vraiment peur des vampires. Mais en voulant se protéger d’eux, il est mort étouffé par la gousse d’ail qu’il plaçait dans sa bouche chaque soir, avant de s’endormir.

Existe-t-il encore aujourd’hui de tels personnages ? On pourrait malheureusement le penser comme en témoigne cet autre fait divers : en 1992 au Brésil, un homme du nom de Marcello Costa De Andrade fut arrêté. De quoi l’accusait-on ? Tout simplement d’avoir assassiné 14 jeunes garçons. Pour quel motif ? Il buvait leur sang, pensant ainsi devenir plus beau.
Cela fait-il de ces personnes des vampires ? Peut-être…

Mort ou vif ?

Mais à l’instar de ces cas étranges, doit-on croire aux vampires ? D’où nous viennent, à l’origine, ces croyances ? Il faut savoir, qu’il n’y a pas si longtemps de cela, nombreuses furent les inhumations prématurées de personnes vivantes, dont on pensait quelles étaient mortes. Ces malheureux, une fois ensevelis et réveillés, prenaient conscience de leur sort épouvantable, paniquaient, puis malgré leurs efforts désespérés pour sortir de ce cauchemar succombaient d’une lente asphyxie. Les pilleurs de tombes furent les premiers témoins de ces scènes effroyables. Ils découvraient ces corps tortillés, leur linceul déchiré et ensanglanté, ainsi que leurs doigts et leurs ongles meurtris pour avoir, en vain, tenté de se trouver une issue. Souvent la bouche était, elle aussi, ensanglantée provenant des morsures de la propre victime. On pensait donc à l’époque, que ces pauvres gens sortaient de leurs tombes la nuit, pour aller boire le sang de quelques innocentes victimes. Tout en étant plus rares, ces ensevelissements arrivent encore de nos jours. Récemment dans les années 70 aux Etats-Unis, une femme enceinte fit une syncope. Le médecin constata officiellement le décès. Quelques jours après l’enterrement, la mère arriva et insista pour voir de ses propres yeux le corps de sa fille. La terrible réalité apparut aux yeux des personnes présentes. Choqués, ceux-ci constatèrent que le bébé était né. Plus terrifiant encore : la mère du nourrisson, avec une expression d’effroi gravée sur le visage, s’était blessée les doigts en essayant de sortir du cercueil avant de décéder…pour la « seconde » fois !

Que penser des tombes retrouvées vides ? Des vampires partis à la chasse comme le croyait la population de l’époque ? Peut-être tout simplement des voleurs de cadavres qui revendaient ensuite les corps à certains médecins à des fins de dissection. Quant aux formes aperçues la nuit dans les cimetières, certains ont suggéré que cela pouvait être des mendiants cherchant refuge dans les caveaux de famille et sortant la nuit à la recherche d’un peu de nourriture.

Malgré ces affirmations, restons prudent car, chaque jour, des phénomènes étranges liés au vampirisme remplissent les faits divers du monde entier. Que penser de ces personnes qui, par exemple, s’aperçoivent le matin au réveil qu'elles ont sur le cou deux traces rouges et que jour après jour elles s’anémient jusqu'à la mort ? À l’aube du 21ème siècle, est-il encore raisonnable de croire aux vampires ?

Une curieuse eau de "vie"...

Nombreux sont ceux qui, parmi nous, sont persuadés de leur existence comme nous le montre cet étrange fait divers :

Février 2004, la justice roumaine a ouvert une enquête à l'encontre de six personnes accusées d'avoir profané le corps d'un villageois qui, selon elles, s'était "transformé en vampire". Effectivement, dans le village de Craiova, au sud de la Roumanie, l’ombre de Dracula rôde toujours. Selon la justice locale, le corps de Petre Toma, 76 ans, mort des suites d'un cancer en décembre, avait été déterré six semaines plus tard par son beau-frère Gheorghe, en présence de plusieurs autres membres de la famille, dont sa veuve et sa petite-fille.
Selon plusieurs témoignages, les profanateurs ont fait une incision dans la poitrine de Toma et extrait son coeur, avant de le brûler et d'en mêler les cendres avec de l'eau, qu'ils ont bue. Une autopsie effectuée mardi par les légistes de Craiova a confirmé que "le cœur a bien été prélevé". Les six personnes ont expliqué qu'après la mort de Toma, elles s'étaient senties "affaiblies", comme si elles n'avaient "plus de sang". "La nuit, je le voyais dans ma chambre, et le matin, je ne pouvais plus me lever, tellement j'étais affaiblie", a raconté la petite-fille de Toma, Mirela Marinescu. Selon elle, dès que le rituel a été accompli, "le mort n'est plus venu hanter" sa famille. Plusieurs villageois ont affirmé que ce rituel était connu et pratiqué depuis longtemps dans la région, et qu'il s'était à chaque fois révélé "efficace contre les vampires".

Laissons le mot de la fin à l’expert en vampires Montague Summers : « qu’on le veuille ou non, il faut admettre que la tradition du vampire contient beaucoup plus de vérité que l’individu ordinaire ne l’imagine ou ne le reconnaît. »



Les vampires au cinéma

Dracula, et le vampire en général, reste le mythe le plus marquant du cinéma fantastique. On dénombre presque 200 adaptations cinématographique dont il fut l’élément principal, allant du chef d’œuvre au navet le plus total. Je ne citerai ici que les adaptations qui me semblent dignes d’intérêt par la réalisation, le jeu d’acteur ou la retranscription la plus fidèle du roman de Stoker. Mais ce n'est que mon avis alors à vous de voir !

Le plus terrifiant
"Nosferatu" (1922) de F.W. Murnau. Voici LE film culte à posséder de toute évidence. Angoissant et cauchemardesque, cette perle de l’expressionnisme allemand est le plus effrayant de tous les films de vampire… À faire froid dans le dos.
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Le plus classique
"Dracula" (1931) de Tod Browning. Bela Lugosi en Dracula très théâtral. Rôle qui lui collera à la peau durant toute sa carrière. Premier Dracula parlant de l’histoire du cinéma.
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Le plus séducteur
"Le Cauchemar de Dracula" (1958) de Terence Fisher. Christopher Lee à la fois charmeur et animal est diabolique dans le rôle du comte. L’un de ses grands rôles.
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Le plus envoûtant
"Nosferatu" (1979) de Werner Herzog. Remake plan par plan de l’œuvre de Murnau ! Avec Klaus Kinski impressionnant dans le rôle-titre. Par contre, oubliez sa suite « Nosferatu à Venise ».

Le plus esthétique
"Bram Stocker’s Dracula" (1992) de Francis Ford Coppola. Le chef d’œuvre de Coppola est l’adaptation la plus fidèle du roman. Grandiose et Incontournable !
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Le plus historique
"L’ombre du Vampire" (2000) de E. Elias Merhige. Interprété par John Malkovich et Willem Defoe, ce film, produit par Nicolas Cage, retrace le tournage mouvementé et étrange du Nosferatu de Murnau. Excellent film et interprétation extraordinaire de Malkovich et de Defoe. Un conseil cependant : préférez la V.O.S.T que la V.F. car le doublage de Defoe est limite risible.
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À voir aussi : "Vampyr" de Carl Dryer (1932), "Le bal des Vampires" de Roman Polanski (1968), le "Dracula" de John Badham (1979) et "Entretien avec un Vampire" de Neil Jordan (1994) d'après le roman d'Anne Rice.

[NDR : La liste des navets dont parle Erick est longue mais le dernier en date à éviter est "Dracula 2001" de Patrick Lussier ou comment casser le mythe en 99 minutes ! Je les ai vécues... Olivier]

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